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COLLECTIF EUROPEEN
D'EQUIPES DE PEDAGOGIE INSTITUTIONNELLE
auteur : Dominique
date : déc. 2007
mots-clés : écrire, choix de textes

Dominique   - décembre 2007

 L'écriture dans ma classe : le choix de textes

 

Est-ce que je pourrai lire mon texte à la classe ?

Il est bien rare que cette question ne surgisse pas chaque année. Alors, qu'est-ce que j'en fais ?

Je démarre la plupart du temps l'année par la réalisation d'un album collectif ( album de rentrée, album de vacances…) pour fédérer, donner envie d'écrire, de raconter, partager. Cet album est illustré, les enfants en sont fiers, ils ont plaisir à le feuilleter et il part dans les familles…Ce premier projet d'écriture est souvent un déclencheur car à travers l'album, le texte de chacun est valorisé sans jugement sur la longueur ou la qualité du texte.

Et puis d'autres textes arrivent, à ma demande, sur un thème ou un autre, et puis on écrit pour les correspondants, et puis arrive le texte libre : « on peut écrire ce qu'on veut ? Chouette alors !                                             

 Ou bien : « on peut écrire ce qu'on veut ? Mais moi, je sais pas quoi écrire… »

Et je propose le classeur des déclencheurs d'écrits qui, pour ma part est encore en grand chantier, mais dont je peux livrer quelques éléments aux enfants pour démarrer…

Est-ce que je pourrai lire mon texte à la classe ?

Ça y est, je les sens prêts, la classe tourne, le cadre institutionnel est suffisamment rassurant pour que ceux qui le veulent se risquent à lire leur texte à la classe. J'utilise volontairement ce mot de risque car je trouve qu'il existe un danger même si les auteurs n'en sont pas conscients. Ce n'est pas seulement à travers ce qu'ils livrent ou non dans leur texte et que nous sommes plus ou moins capables de percevoir, cette part d'inconscient si difficile à appréhender, mais c'est parce qu'un écrit c'est toujours une trace qu'on laisse. Même le texte le plus anodin en apparence, à partir du moment où il est volontairement lu à la classe mérite d'être accueilli. Je souhaite que ce temps soit institutionnalisé, je pense que je ne pourrais pas faire autrement, j'aurais bien trop peur des moqueries, des dérives, des copinages, des jugements…

Le choix de textes est présenté au conseil, le cadre est posé, les règles de protection, les règles de fonctionnement ( je les affiche)…Généralement, quand il y a une dizaine d'inscrits au choix de textes, je l'inscris sur l'emploi du temps et deux textes sont élus et mis dans le classeur des textes élus. Cette année j'instaure un métier de suivi du classeur pour rappeler aux auteurs de ne pas oublier de mettre leurs textes, de les illustrer… Sinon, je ne pense pas toujours à veiller et en fin d'année, je trouve que j'ai délaissé cette importante institution.

Il a été demandé au conseil dernier de donner des dates à l'avance pour le choix de textes (comme pour le conseil spécial ceintures) pour que les enfants puissent préparer des textes, plutôt que d'attendre le nombre…Cette proposition est mise au vote et acceptée.  Moi, j'ai un peu  peur qu'avec la correspondance on ne tienne pas le rythme, mais je dois faire confiance, après tout si ça ne fonctionne pas, on en parlera au conseil.

Je suis toujours étonnée qu'ils aient tant envie d'écrire, qu'au bilan du soir il puisse y avoir des « ça va pas parce qu'on n'a pas eu assez de temps pour écrire… » que l'écriture ne soit pas cette chose fastidieuse qu'il fallait se coltiner sur le thème de l'automne avec ses métaphores bateau …Ce qui est difficile, justement c'est de trouver du temps pour écrire, lire, corriger, présenter…et les corres…et les albums…et les programmes ? et les éval ? Je trouve que je dois toujours jongler avec le temps pour trouver un équilibre bien fragile. Mais quand l'enfant dit « très dyslexique » vient avec ses trois pages manuscrites ( quasiment en phonétique), je retape le texte pour qu'il puisse le recopier dans son cahier d'écrivain et comme les autres, il s'inscrit pour être élu. Je trouve que nous avons tous sur ces textes de belles aventures à raconter.

Pour finir ces quelques réflexions livrées sur l'accueil de l'écrit dans ma classe, je vous propose un texte de L. qui a été le premier texte élu cette année dans ma classe et qui m'a interrogée. L. est une fille unique, dont le papa est parti à l'autre bout du monde, elle n'en a plus de nouvelles depuis deux ans.

Moi et deuxième moi

J'étais en train de me regarder dans la glace et tout à coup mon reflet est sorti du miroir : c'était un deuxième moi, donc je l'ai appelé comme ça : deuxième moi. Je lui ai dit : « Dis donc, deuxième moi, tu n'as pas mieux à faire que de sortir du miroir ? » Il me répond : « Bien sûr que si, j'ai mieux à faire, mais j'en ai marre de rester dans le miroir à t'imiter donc je suis sorti ».

Je lui réponds : « Formidable ! Quel exploit ! Bon, je n'ai pas envie de te voir ». Après il me dit : «  Bah ! d'accord, à plus ».

Je lui dis : « Bon vent et n'envoie pas de carte postale ».

Plus tard j'en reçois une de deuxième moi et il disait : 

Salut cher pote ! Tu savais que je sors du miroir à la pleine lune ? A plus .

Il avait écrit « à plus » comme moi, dès que j'envoie des cartes postales.

Quel idiot ce deuxième moi ! En plus, j'aime pas qu'on me dise « cher pote » et sa lettre était pleine de fautes d'orthographe. Je lui ai envoyé une lettre à mon tour en lui disant : cher pote toi même, et à l'école, tu as fait de l'orthographe ? et t'as pas besoin de venir parce que la pleine lune, c'est le siècle prochain, bah ! au siècle prochain. A + .

Je lui ai fait un mensonge par rapport à la pleine lune.

L.

Mars 2008 : depuis la rencontre de St Vérand à ce sujet, j'ai instauré lors de la présentation du texte à la classe : texte inventé ou texte réel. Je n'avais pas mesuré l'importance de cette précision, et la liberté qu'il offre à l'enfant de présenter un texte inventé même s'il est basé sur un vécu très personnel et qu'il échappe ainsi aux questions : « mais, c'est vrai ? ça t'est arrivé ? »

Et puis L. a écrit une suite à son texte et s'est inscrite au prochain choix de textes.

Moi et deuxième moi ( 2 )

Il est déjà 18 h et bien sûr je reçois une super visite de mon pote à la compote, ça y est : le voilà.

Il me dit : «  Salut, je suis revenu, est-ce que mon cher pote s'est ennuyé pendant les vacances ? Je lui réponds :

- Ah ! ouais, je me suis ennuyé à mort pendant que tu n'étais pas là, c'est sûr.

Il me dit : -On joue au déguisement ? Je lui dis :

-D'accord !

- Alors, qui choisit les persos ? dit deuxième moi. Je lui réponds :

 - Bah ! comme d'habitude, moi, bon, je vais choisir.

 Une seconde plus tard, j'ai une idée, et je lui dis :

 - Je suis la star et tu es la poubelle.

- Oh ! non, j'en ai marre d'être toujours la poubelle, j'arrête de jouer, dit deuxième moi.

Vexé, deuxième moi est parti, il reviendra peut-être un jour.

L.

Ce deuxième moi continue de lui rendre visite… leurs relations ne sont pas faciles et quand reviendra-t-il ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Moi et deuxième moi ( 2 )

 

Il est déjà 18 h et bien sûr je reçois une super visite de mon pote à la compote, ça y est : le voilà.

Il me dit : «  Salut, je suis revenu, est-ce que mon cher pote s'est ennuyé pendant les vacances ? Je lui réponds :

- Ah ! ouais, je me suis ennuyé à mort pendant que tu n'étais pas là, c'est sûr.

Il me dit :

-On joue au déguisement ? Je lui dis :

-D'accord !

- Alors, qui choisit les persos ? dit deuxième moi. Je lui réponds :

 - Bah ! comme d'habitude, moi, bon, je vais choisir.

 Une seconde plus tard, j'ai une idée, et je lui dis :

 - Je suis la star et tu es la poubelle.

- Oh ! non, j'en ai marre d'être toujours la poubelle, j'arrête de jouer, dit deuxième moi.

Vexé, deuxième moi est parti, il reviendra peut-être un jour.

 

Laure




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